La co-évolution s'applique à l'évolution réciproque de plusieurs espèces en
interactions et partageant le même milieu (sympatriques). En étudiant les phénomènes
de compétition vis-à-vis d'une ressource limitante,
les écologistes et les généticiens sont parvenus à la notion de déplacement
de caractère. "Les effets immédiats de la compétition [...] se prolongent
par des effets à long terme, adaptations des populations qui impliquent une transformation de leur structure
génétique et non un simple ajustement de leurs spectres d'utilisation des ressources" [Barbeau, 1992]. L'exemple le plus célèbre est celui
des Pinsons des Galapagos [Grant, 1986]. Les contraintes écologiques
ont également été abordées en termes de co-évolution, avec les pollinisateurs
d'une part, avec les pathogènes d'autre part. Ici encore modélisation et expérimentation sont
mis en oeuvre. - Barbeau, R. (1992) Ecologie des Peuplements. Structure, dynamique et évolution. Masson. 273pp. - Grant P.R. (1986) Ecology and evolution of Darwin's finches. Princeton University Press, New Jersey. |
Pollinisation et co-évolution
Le terme même de co-évolution fut publié pour la première fois par Ehrlich
et Raven (1964) qui étudiaient les rapports plantes - insectes.
Parmi les phanérogames, les angiospermes se distinguent par la fleur. Celle-ci abrite les organes sexuels.
Chez les enthomogames, elle sert d'instrument de liaison et de communication
avec les insectes. Pour cela elle a évolué au contact des pollinisateurs que
sont les insectes, alors qu'eux même évoluaient à son contact, on parle de
co-évolution. De cette coévolution, résulte actuellement toute une série d'attractifs de
la fleur pour l'insecte :
Ces attractifs, pour être efficaces, doivent coïncider avec l'anthèse. La morphologie de la
plante s'est ainsi spécialisée en favorisant le contact de l'insecte avec les organes sexuels. Enfin
cette co-évolution a conduit à des spécialisations de cette relation plante-insecte : des
espèces ou des groupes d'espèces de plantes n'étant pollinisés que par certaines espèces
ou groupes d'espèces d'insectes.
* Ehrlich P.R. et Raven P.H., 1964 - Butterflies and plants : a study in coevolution. Evolution, 18. pp586-608.
Co-évolution prédateurs - proies: Pimentel (1965) a d'abord mis en évidence le rôle de la complexité de l'espace sur la coexistence des espèces. Mais il a aussi montré l'apparition de changements dans les rapports prédateurs - proies au cours du temps.
* Pimentel D., Feinberg E.H., Wood P.W., et Hayes J.T. (1965) Selection, spatial distribution, and the coexistence of competing fly species. Am. Nat., 99. 141-167.
Interaction et co-évolution hôtes-parasites: L'exemple le plus connu est
celui du virus de la myxomatose introduit en 1950 en Australie pour diminuer la population des lapins qui ont envahi
tout le continent. Ainsi, très rapidement après l'infestation du virus, l'effectif des lapins a diminué
de 99 %. Mais par la suite, l'hécatombe des lapins s'est ralentie : la virulence du virus s'est atténuée
et la résistance des lapins s'est accrue.
Paradigmes biologiques Vie Artificielle au
LIASC
à l'ENST de Bretagne (Dominique Snyers). L'objectif majeur de la Vie Artificielle est de contribuer
à la compréhension et à l'abstraction - via notamment une utilisation massive des supports
physiques comme les ordinateurs et les robots autonomes - des mécanismes fondamentaux des systèmes
complexes et en particulier des systèmes vivants. Les protagonistes de toute explication de phénomènes
biologiques sont l'environnement, le code génétique et l'entité biologique structurée
(organisme,...) maintenant sa viabilité et se montrant capable de facultés d'adaptation. Les thèses
"environnementalistes'' et "héréditaires'' ont montré l'importance respective de
chacun des deux premiers acteurs. Mais, comme l'a souligné M. Veuille (1988) "la réaction d'un
organisme ne dépend ni d'un processus essentiellement génétique, ni d'un processus essentiellement
environnemental (...). L'organisme, loin d'être une marionnette, intervient de manière active dans
son environnement (...)''. Il y a en fait co-détermination dynamique des trois protagonistes. Pour maintenir
sa viabilité dans un environnement changeant, les individus adoptent des mécanismes d'auto-adaptation
à court terme spécifiques à leur espèce et dont l'efficacité influe sur la distribution
respective des différentes espèces d'une population. Il s'ensuit une modification supplémentaire
de l'environnement. Le processus de co-évolution ensuite, par une combinaison de sélections et de
mutations, agit comme un mécanisme d'auto-adaptation à long terme qui pousse la population dans son
ensemble vers un comportement adapté à l'environnement changeant. Nous nous intéressons à
ces deux niveaux d'auto-adaptation.
* Veuille M., "Evolution et comportement animal'', in Colloque de Cerisy ``Temps et Devenir'', Patino Ed, Genève, 1988
le LIASC étudie d'autre part, les phénomènes de co-évolution d'un point de vue théorique
et par simulation afin de mieux comprendre la dynamique d'apparition et de disparition d'espèces en tant
qu'auto-adaptation d'une population dans un environnement changeant. Nous envisageons la possibilité d'utiliser
cette dynamique de compétition entre individus d'espèces différentes et en interaction pour
développer de nouveaux types algorithmes d'optimisation.
Dans le cadre de la résolution de problèmes, nous appliquons également des algorithmes génétiques
à divers problèmes d'optimisation combinatoire.
Animats et co-évolution: L'étude des interactions entre les processus d'apprentissage et d'évolution a donné lieu à quelques réalisations sous couvert de l'approche animat. Il a été, en particulier, clairement démontré que l'apprentissage individuel peut accélérer l'évolution de l'espèce, illustrant un phénomène plus général appelé effet Baldwin. Ce phénomène, que Baldwin (1896) a qualifié de sélection organique à la fin du siècle dernier (!!) découle du fait que la sélection naturelle n'opère pas sur les variations génétiques, mais sur les variations phénotypiques qui, elles, dépendent à la fois de l'hérédité et du milieu. Dans ces conditions, il est possible que des avantages sélectifs, initialement procurés par la faculté de réaliser un apprentissage donné au cours de la vie des individus, soient assimilés génétiquement, au fil des générations successives, et peu à peu assurés uniquement par le génome. Un tel processus d'assimilation génétique a été mis en évidence par Waddington (Waddington, 1953), qui a montré en quoi il se démarquait d'un processus lamarckien.
L'apport capital de l'approche animat dans ce domaine est que, alors que les biologistes tendent à considérer que ces phénomènes ne peuvent être que rares et ne présenter qu'une ampleur très limitée, il est démontré qu'ils s'appliquent à une grande variété de situations et qu'ils peuvent présenter une valeur opérationnelle. En particulier, puisque l'effet Baldwin peut accélérer et canaliser l'évolution, il peut constituer une solution aux problèmes de convergence vers des solutions désirées qui viennent d'être évoqués.
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