
Rapport de Mission
Symposium ICES/SCOR : " Ecosystem effects of Fishing "
Montpellier Le Corum 16-19 mars 1999
Jean Le Fur
I. Déroulement du symposium
A. Session plénière
1. Aperçu des différents types décosystème
2. Aperçu des différents types de ressource
3. Quantification de limpact des pêches sur les écosystèmes
4. Perspectives des objectifs écosystémique
dans la gestion des pêches
5. Outils de gestion pour atteindre les objectifs
écologiques dans les plans de gestion des pêches
6. Etudes de cas sur les approches actuelles pour atteindre les
objectifs écosystémiques
7. Débat : implications des considérations écosystémiques
pour le futur de la gestion des pêches
B. Posters
II. Documentation disponible
III. Commentaire personnel
- Déroulement du symposium
Les contributions soumises étaient toutes présentées sous la forme de posters. Le symposium
proprement dit consistait en une seule session plénière où se sont succédés
des conférenciers invités. Toutes les fins daprès-midi sest déroulée une session
poster/discussion. Cette organisation me semble tout à fait adéquate, comparée aux colloques
où une pléthore de communications oblige à des séances en parallèle et donc
des choix souvent difficiles. La succession de conférences invitées permet en outre une progression
construite sur la durée du symposium. La présentation sous forme de poster permet enfin de choisir
les sujets dintérêts, dy passer le temps que lon souhaite et de discuter avec les auteurs. Toute
la session plénière sest déroulée en anglais sans traduction. De nombreux francophones
se sont trouvés lésés par cet état de fait (laccès au français lors
de réunions en France nest-il pas légalement obligatoire ?)
- Session plénière
La session plénière sest déroulée en trois phases : la première phase
a consisté en un aperçu de la situation des différents types décosystème, puis
des différents types de ressource. La deuxième sur diverses considérations pour aborder le
problème (outils danalyse, point de vue des acteurs, mesures de gestion disponibles). La troisième
phase portait sur la faisabilité (outils, exemples, débat) de cette approche en terme de gestion
des pêches.
Je présente ci-dessous les éléments que jai jugé marquants au fil des présentations
(ainsi que quelques commentaires en italiques). Une description fidèle du contenu des communications peut
être obtenue dans le livre des résumés (disponible parmi les participants IRD au congrès).
- Aperçu des différents types décosystème
- Les côtes et les estuaires (Steve Blaber)
- Il est difficile danalyser spécifiquement limpact des pêches sur les écosystèmes
séparément des autres activités côtières
- La comparaison de deux zones avec faible et forte pression de pêche dans la lagune Ebrié montre
que si la richesse et la diversité sont similaires, la distinction se fait au niveau des espèces
qui composent lune et lautre communauté.
- Récifs coralliens (Mac Manus)
- Il est difficile de faire la part entre les effets de la pêche et les effets liés aux fluctuations
des apports en nutriments
- Kelp Forest ; forêts dalgues géantes (Mia Tegner)
- Présentation dun type décosystème très productif (et très beau) dans lequel
des laminaires géantes offrent gîte et couvert à toute une chaîne écologique.
- Présentation dun système dans lequel les effets secondaires de la pêche sont plus importants
que la pêche elle-même : la seule pêche aux langoustes, provoque une augmentation drastique
des populations doursins (couverture continue du sol) et empêche le développement des algues donc
une désertification de lécosystème qui repose entièrement sur ces organismes (réaction
en chaîne).
- Mer fermées (J.Caddy)
- Le problème principal est ici leutrophication (particules, boues) du milieu. Elle est provoquée
par lactivité anthropique littorale dont les effets sur lécosystème dépassent largement
celui de la pêche.
- Upwellings (P.Cury)
Deux questions actuelles ont été présentées :
- la première porte sur la notion de contrôle dun niveau trophique sur lautre ; le plancton
sur les pélagiques, les prédateurs sur les pélagiques, et les variantes. Une théorie
a été présentée (Wasp Waist / taille de guêpe) selon laquelle, dans la chaîne
plancton pélagiques prédateurs, tout le contrôle serait réalisé par le maillon
intermédiaire (top-down vers le bas, bottom-up vers le haut).
- La deuxième question porte sur la mixité despèces dans les bancs et son interprétation
en termes de stratégie adaptative : la notion de school-trap sous-tend que, dans un écosystème
pélagique mixte anchois-sardines par exemple, le déficit en anchois pousse ces derniers à
se mélanger aux bancs de sardine (et vice-versa) pour des raisons de protection (voir figure ci-après).
Ce comportement constituerait une impasse dans la mesure où les bancs danchois nont pas les mêmes
contraintes écologiques de développement que les bancs de sardines ; les anchois " réfugiés "
dans les bancs de sardine ne se trouveraient donc pas en conditions optimales pour leur développement. Ce
processus constituerait un cercle vicieux (school-trap).

- Mers boréales (S.Tjelmeland)
- Mers profondes (T.Koslow)
- Les écosystèmes des monts sous-marins sont présentés comme des milieux très
riches et semi-autonomes (Seuls 5% de la production de surface atteignent les 1000m de profondeur). Les espèces
et chaînes trophiques présentes sont très peu adaptables et larrivée dune exploitation
sur ces écosystèmes a conduit a une désertification fulgurante de ces milieux (ce fut bon
mais ce fut court).
- Aperçu des différents types de ressource
- Démersaux (G.Bianchi)
- Un rapide inventaire des écosystèmes démersaux dans le monde et des causes de leur changements
montre que les perturbations sexpriment par substitution despèces, altération dhabitats, changements
des spectres de taille.
- Les méthodes danalyse présentées pour aborder ces problèmes décosystème
sont létude des index dexploitation (captures totales toutes espèces / biomasse totale toutes espèces),
des indices de diversité et létude des spectres de taille qui est présentée comme
une approche prometteuse (la pente et lintersection de la " droite " semble répondre
de façon prédictible à la pression de pêche).
Je nai pas assisté à la matinée du 17 mars car jétais au HEA. Jai donc loupé
les exposés de Fonteneau sur les thons, Stevens sur les requins et raies, Reid sur le plancton, Hall sur
le benthos et Tasket sur les oiseaux marins.
- Quantification de limpact des pêches sur les écosystèmes.
- Définition de la surexploitation dun point de vue écosystémique (S.Murawski)
- Lors de cet intéressant exposé, Murawski a soutenu que lon devait passer dun point de vue
écosystémique sur la définition de la surexploitation pour lequel laccent est mis sur
la conservation des composants (surexploitation de croissance, de recrutement, recouvrement de stock, MSY/MEY,
espèces protégées) à une définition écologique de la surexploitation
dans laquelle laccent serait mis sur la conservation des processus (biomasse et production par le système
et ses composants, diversté despèces, de communautés et de niveaux écosystémique,
variabilités telles que résilience ou recouvrement, profit social et économique sachant que
les bénéfices retirés de la surexploitation sont inférieurs à ceux retirés
dune exploitation saine).
- Pêche, sélection et évolution phénotypique (R.Law)
- La pêche y a été présentée comme un processus de sélection darwinienne
orientée.
- Espèces en risque dextinction par la pêche (R.Powles)
- Après avoir rapidement montré quels types despèce étaient plus exposés
(faible fécondité, petites aires de distribution, etc.), lexposé a surtout porté sur
la difficulté (enjeux, multi-critères) et les procédures élaborées pour décider
si une espèce est ou non en danger. Les procédures dévaluation actuellement utilisés
lui paraissent efficaces.
- Powles a évoqué lapproche précautionneuse comme moyen dévaluation. Il a aussi
mis laccent sur le besoin de caractériser le risque avant de pouvoir le gérer.
- Ecopath comme outil dévaluation (D.Pauly)
- Pauly, à travers une analyse des modèles décosystème développés
en utilisant EcoPath à travers le monde, produit deux nouveaux index simples fondés sur les rendements
de pêche et les niveaux trophiques pêchés et permettant, selon lui, de quantifier la santé
ou lintégrité dun écosystème donné.
Note sur la démarche : D.Pauly semble être lobjet en France de nombreuses critiques
(manque de rigueur de " ses " logiciels, approche commerciale agressive,
). Pauly devient
cependant incontournable dans lapproche écosystémique en halieutique, en témoigne le nombre
de fois où les exposants ont fait référence à ses travaux. Malgré un manque
possible de rigueur (qui me paraît devoir être pondéré selon les différentes cibles
de publication quil vise, des publications Iclarm à Tree, Fish Reviews, Science, etc.), il apparaît
que les bases de connaissance quil a pu progressivement accumuler sur les écosystèmes (EcoPath)
et les espèces marines (FishBase) lui permettent à présent de développer des approches
comparatives à un niveau très global, approches qui permettent dobtenir des connaissances très
pertinentes sur les réponses des écosystèmes. Certaines de ses publications (une vingtaine
par an ?) constituent déjà des clés de voûte pour la recherche dans ce domaine.
Plus généralement, la manipulation de grosses bases de données pour extraire de nouveaux
types de connaissance est en train de prendre de plus en plus dimportance (voir aussi les travaux de la FAO).
On peut se demander si un effort de compilation et de mise en correspondance des informations originales acquises
depuis 50 ans dans notre institut ne mériterait pas dêtre développé dans cette perspective.
- Les modèles multi-spécifiques améliorent-ils les modèles mono-spécifiques
pour évaluer limpact des pêches sur les écosystèmes ? (A.Hollowed)
- Lévolution des théories sur lorganisation des écosystèmes présente trois
phases : le principe dexclusion compétitive (Gause, 1934), la coexistence réglée par
les prédateurs (predator mediated coexistence) (Caswell, 1976) et le principe de coexistence de Den Boer
(1986). Lensemble a finalement conduit à la notion de capacité de charge variable (Kashiwai, 1996).
- Les modèles décosystèmes fondés sur lagrégation des classes dâge
sont a priori peu aptes à la prédiction
- Les directions qui lui apparaissent prometteuses dans ce domaine sont : les tables de décision,
les indicateurs majeurs de changement écosystémique (biodiversité et al. je suppose), la prédiction
des interactions entre un nombre limité despèces représentée par des modèles
en structure dâge.
- Elle conclue quil est nécessaire détablir un cadre rigoureux et testable (sic).
- Indicateurs de la stucture des communautés utilisés comme mesure dimpact (J.Rice)
- Rice les classe en mesures dordination, mesures dagrégation et mesures de propriété.
Pour ces dernières, il définit 4 propriétés des écosystèmes : la
stabilité, la résilience, la réversibilité et linvasibilité. On notera lanalogie
entre les trois premiers et loriginalité du dernier qui fait référence à tout autre
chose (assez rarement étudié à ma connaissance).
- Il suggère dans ce domaine de se rapprocher des études réalisées sur les insectes
pour lesquelles de grandes similitudes peuvent être notées.
- Selon lui, linformation quil est nécessaire dacquérir concerne (i) lhistoire des systèmes,
(ii) le " stressor acting " ( ?) et (iii) le suivi des tendances.
- Indicateurs de durabilité et mesures de la santé des écosystèmes (N.Daan)
- Selon Daan, nous ne pouvons assurer la durabilité des écosystèmes, nous ne pouvons quassurer
la durabilité de lusage des écosystèmes.
- N.Daan remet en outre au goût du jour un type de graphe peu utilisé : les graphes excel de
type radar (voir figure ci-après). Il permettent de visualiser rapidement létat de lécosystème
en fonction dune batterie dindicateurs qui peuvent être de nature très différente.


- Perspectives des objectifs écosystémique dans
la gestion des pêches
(pas de résumé fourni pour ces interventions)
- Perspectives dune ONG (T.Agardy)
- T.Agardy avait beaucoup de choses à dire, une assurance éloquente qui en dit long sur leurs " nous
avons raison ". Le mode de fonctionnement des ONG consiste à se positionner entre recherche et
acteurs et mettre en uvre les résultats des uns pour le bien être des autres. Les ONG font en effet
preuve dun pragmatisme souvent efficace (ce na pas toujours été le cas). On regrettera quand même
le dénigrement de certaines approches scientifiques (e.g., modélisation) qui sont jugées stériles
(je traduis approximatif) ce qui me semble un peu exagéré
- T Agardy a bien précisé que sa présentation traitait de son ONG (Conservation International,
Washington) et non pas des ONG en général.
- La notion de réseau daires marines protégées a été proposée comme
une solution efficace à la lutte contre la désertification des écosystèmes. Cette solution
me paraît en effet pertinente, permettant, selon moi, daugmenter significativement lespace vital des ressources
conservées bien au delà de la surface réellement protégée.
- Perspective dun gestionnaire du gouvernement (N.Bellefontaine, remplacé par ??)
- Les cibles essentielles de la gestion présentées par le canadien étaient la biodiversité
et la productivité des habitats. Il a plaidé pour une gestion des pêches intégrée
associée à une gestion intégrée des zones côtières (pêche, transport,
pétrole, usages du littoral).
- Les nouveaux outils mis en avant sont (i) la gestion intégrée des zones côtières
qui sous-tend selon eux une approche patrimoniale (» focaliser lensemble des
acteurs sur un objectif partagé à long terme), (ii) les aires marines protégées,
(iii) la qualité de lenvironnement marin.
- Le défi de la gestion est de pouvoir combiner une demande croissante, un nouveau cadre légal,
une connaissance imparfaite (précaution) , le besoin de prendre des décisions et la prise de risque
intelligente. En résumé, rendre les objectifs opérationnels pour atteindre les cibles.
Lénumération exhaustive de tous les concepts à la mode laissait plus limpression dune
leçon bien apprise que dune réelle réflexion sur les problèmes à traiter (et
lon sait quau Canada, ils sont graves).
- Perspective dun pêcheur industriel (P.Soisson)
- Cet entrepreneur français a présenté la situation de son entreprise, une flotille de crevettiers
opérant dans le monde entier. Il sest particulièrement attaché au cas des crevettes de Guyane,
sattaquant ainsi à un des problèmes les plus critiques dans ce domaine : le reproche fait aux
crevettiers sur leurs prises accessoires abusives.
- Il a présenté les contraintes dun entrepreneur, liées exclusivement à la
demande qui fluctue en quantité et en qualité (le calibre des crevettes requises par le marché
est variable). Selon lui, les rejets ont de tout temps été importants et lévolution des captures
de ces navires na jamais laissé transparaitre de problème de diminution dabondance, tout au plus
des fluctuations. Il ny a cependant pas de problème de baisse des captures.
- Il admit que la recherche est un élément essentiel mais fit constater à lassemblée
que les recommandations nentraient (et nentreraient) en aucune manière dans les critères retenus
pour organiser son exploitation.
Ce point de vue a été je pense assez salutaire en permettant de relativiser les enjeux (i.e.,
définis au sein dune communauté scientifique pour une communauté scientifique) dont il était
ici question depuis le début du colloque.
- Perspective dun ministre des pêches (P.Bernal)
- P.Bernal, bien connu dans le milieu halieutique chilien a été successivement chercheur, responsable
dun centre dhalieutique (IFOP), ministre des pêche et professeur. duniversité. Il est actuellement
à lUNESCO.
- Il exposa la difficulté pour un ministre de prendre en compte les recommandations des scientifiques,
pointant que les objectifs dun ministre des pêches ne sont pas de gérer les pêches mais de
gérer lintérêt humain. Il présenta la difficulté de prendre des décisions
politiques qui doivent prendre en compte des critères à plusieurs niveaux, le plus difficile étant
celui des opérateurs.
- Outils de gestion pour atteindre les objectifs écologiques
dans les plans de gestion des pêches.
- Instruments légaux et changements liés à la gouvernance (E.Meltzer)
- E.Meltzer avance elle aussi un nouvel acronyme (EIA : Environmental Impact Assessment) quelle applique
au problème de la gestion côtière. La gestion du littoral est selon elle plus une gestion de
lusage quune gestion des ressources.
- On est passé selon elle du MSY considéré comme une cible au MSY considéré
comme une limite.
- Elle a de même proposé un modèle intéressant (voir figure) qui résume son
approche et laspect multi-critères quelle voit au problème de la gouvernance.


- Instruments économiques (R.Arnasson)
- R.Arnasson présenta un nouveau modèle économique. Comme bien des présentations
de ce style, le premier transparent commence sur un système déquations différentielles très
simple que lorateur décortique ensuite longuement (et je suppose avec brio) pour finir sur une théorie
fonctionnelle en économie. Javoue avoir vite décroché et suis bien en peine de savoir quel
était le message (daprès le résumé, le meilleur mode de gestion dans une perspective
écosystémique est lutilisation des droits de propriété).
Ces modèles sans cesse remis sur la table par certains économistes ont certainement conduit
à des résultats notables (ce sont eux qui gouvernent le monde il me semble). Ils laissent cependant
toujours limpression désagréable de modèles qui se tiennent sur le plan théorique
mais qui paraissent trop simplificateur pour que lon puisse y trouver un lien suffisant avec la réalité.
- Modification dengins (P.Stewart)
- Stewart présenta un aperçu des modifications techniques qui avaient pu être réalisées
pour limiter les problèmes, particulièrement la sélectivité sur les tailles et les
espèces ciblées (problème des prises accessoires). Des solutions ont surtout été
présentées pour les chaluts.
- Il conclue cependant que ces améliorations qui favorisent lévitement conduisent à diminuer
fortement les captures et ne sont pas toujours acceptables pour les industriels.
- Aires marines protégées (R.Sumaila)
- Lexposé de Sumaila fut un peu décevant compte tenu de lenjeu actuel des aires marines protégées.
- A partir de lexemple de lAustralie (omniprésente dans ce colloque), il a cependant pprésenté
tout lintérêt de grands parcs marins dans lesquels sont développés une multi-activité
associée à une gestion adaptative. Cette approche, qui permet de bénéficier de grandes
surfaces pour ces zones lui apparaît préférable aux aires totalement interdites (no take reserve).
- Mise en uvre de stratégies de gestion opérationnelles pour atteindre les objectifs de gestion
écosystémique des pêches (K.Sainsbury)
- Sainsburry présente lintroduction de normes de qualité type ISO pour lenvironnement (ISO14000).
- Un point réalisé sur lutilisation des indicateurs à travers une méthode appelée
Management Strategy Evaluation (MSE) lamène à résumer les éléments à
rassembler pour utiliser un indicateur de façon opérationnelle (voir Figure).

- Les objectifs à atteindre pour y parvenir sont la définition des objectifs, la détermination
dune mesure de la performance, une stratégie ( ?) et les prérequis à lobtention des
informations.
- Etudes de cas sur les approches actuelles pour atteindre
les objectifs écosystémiques
- Lexpérience européenne (K.Richardson)
K.Richardson présente létat de lapproche écosystémique pour la zone ICES.
- On est passé de la notion denvironnement à la notion décosystème sous la pression
du public.
- Elle constate une convergence progressive (lhistorique est intéressant) entre recherches sur les contaminants
et halieutique en direction de lidentification et lutilisation dindicateurs écosystémiques.
- Lexpérience du CCAMLR (A.Constable)
- Exposé dune approche précautionneuse et constitution de systèmes dinformation à
lintention des gestionnaires pour la conservation des ressources antarctiques.
- Lexpérience américaine (D.Fluharty)
- Les objectifs de la politique écosystémique aux USA sont : (i) rendre compatible
les motivations locales avec les objectifs globaux, (ii) contracter des assurances (purchase insurance)
contre les impacts imprévus, (iii) apprendre à partir des diverses expériences de gestion,
(iv) promouvoir léquité et la participation dans les politiques et la gestion, (v)
changer la charge de la preuve et (vi) utiliser lapproche de précaution (NB : le point v
est inclus dans le point vi).
- Fluharty présente la notion de Fishery Ecosystem Plan (FEP) qui est défini en référence
aux FMP (Fishery Management Plan) et doit permettre de fournir un contexte pour intégrer les approches écosystémique
dans la gestion.
- Les recherches recommandées portent sur la notion dEcoWatch (i.e., surveillance, veille) et lexploration
dapproches fondées sur la gouvernance décosystème.
- Lexpérience du Sud-est asiatique pour limiter la pêche au cyanure (C.Barber & V.Pratt)
- La pêche artisanale dans le SE Asiatique est marquée par la technique de pêche au cyanure.
Les conséquences sont assez terribles, tant en terme deffet sur la ressource, que pour lespérance
de vie des pêcheurs ou la santé des consommateurs. Les efforts importants pour enrayer cette pratique
sont présentés. Le problème identifié se traduisait par le fait que lexploitation
était entrée dans un cercle vicieux (plus on pêche au cyanure plus il faut pêcher au
cyanure). Lobjectif a alors été de définir ce que Barber appelle une " Win-Win
strategy ", un cercle vertueux. Le processus long et important (la zone à couvrir est grande)
a été présenté et des résultats concluants ont semble-t-il été
obtenus.
- Lexpérience des Philippines en gestion côtière intégrée (L. Talaue Mc
Manus)
- Pour faire face à une pêcherie corallienne en piteux état biologique et social, un projet
dICM (gestion côtière intégrée) a été développé. Des cartes
de ressource (au sens large) côtières ont été constituées et lon a tenté
de diversifier et de jouer sur lallocation des différentes zones en fonction des activités les plus
propices à lutilisation de la zone concernée (écotourisme, gestion des pêches, commerce
et navigation, usage multiple, aires marines protégées).
- Lapproche retenue est participative, dans le sens où les membres du projet ont fourni les connaissances
nécessaires aux opérateurs (ruraux) pour quils puissent négocier avec les gestionnaires (et
vice versa, mais dans une moindre mesure). Il sagit dune approche différente des ONG (qui se placent en
intermédiaires tampon entre intervenants, en loccurrence recherche acteurs (cf. 4.a.*),
alors quici, le projet se plaçait en retrait avec lambition de susciter lenvie dinteraction entre acteurs
et gestionnaires.
- Il sest agit dun processus de longue haleine mais qui, daprès lexposé, semble maintenant
porter ses fruits. Un des grands avantages de cette approche étant le caractère profond du changement
qui a été induit (culture de communication). Selon moi, cest une approche très profitable,
bien quelle nécessite un investissement humain lourd et certainement, suite à une discussion avec
lexposante, un éloignement obligatoire des problématiques scientifiques.
- Débat : implications des considérations
écosystémiques pour le futur de la gestion des pêches.
Cette table ronde rassemblait des gestionnaires de différents pays ou zones : UE, Norvège,
USA, Canada, Australie, Afrique du Sud. Chacun a présenté la façon dont la pêche était
gérée ainsi que son point de vue sur lapproche écosystémique présentée
tout au long du colloque.
Les points de vue différents qui se sont succédés ont bien montré que les approches
sont très différentes dune région à lautre :
- la Norvège a insisté sur le maintien des données de débarquement et de taille de
capture comme instrument majeur pour la prise de décision,
- lUE a précisé ses deux priorités, soient léquilibrage de la puissance de pêche
des flottille à la capacité des océans et lapplication des règles qui ont été
définies.
- Les USA ont insisté sur lapport de lapproche précautionneuse compte tenu du contexte complètement
incertain dans lequel on se trouve.
- Le " représentant " des PVD a évoqué le besoin de collecter des données,
- le Canada a proposé de ne plus penser en termes de charge de la preuve mais en terme de charge de participation.
Il a aussi souligné que lallocation de droits de propriété méritait dêtre généralisée.
Comme souvent, la discussion finale sest engagée sur de multiples sujets indépendants mais rien
de vraiment consensuel na pu émerger.
NB : Un intervenant oral a présenté ce quétaient pour lui les connaissances majeures
qui étaient sorties du colloque. Son intervention était brillante mais tout à lécouter
je nai rien noté. Si quelquun a cette information pourrait-il la transmettre ?
- Thèmes récurrents
Les thèmes qui sont le plus souvent revenus étaient : les indicateurs, la diversité
(diversity, richness, evenness), le manque de connaissance sur les dynamiques en jeu, les espèces " charismatiques ",
les espèces clés de voûte (keystone species).
On aura aussi noté que la pléthore de nouveaux acronymes pourrait témoigner dune explosion
de nouvelles approches. Il semble cependant que malgré cette profusion, les problématiques convergent
presque toutes vers un maximum de 3 ou 4 approches telles que précaution, conservation, participation, gestion
intégrée.
- Posters
Je nai pas pris beaucoup de notes lors des posters. Métant surtout intéressé aux posters
traitant de méthodologie, jai cependant noté:
- Perotta et al. qui lient de façon assez exotique écologie et économie : ils parviennent
à définir la température de surface en tant quindicateur économique : 19°C
constitue selon eux la limite supérieure de température nécessaire à lobtention dun
profit économique pour la pêcherie de maquereaux quils étudiaient.
- Pitcher et al . ont présenté un poster très intéressant sur lutilisation
de ROV (remotely operated vehicle) pour létude des démersaux. Un quadrillage vidéo intense
leur permet de positionner la faune et la relier aux traits de chalut. Des méthodes permettent même
de quantifier labondance de la faune à partir des images vidéo
- Xx ? un simulateur sur les langoustes en Australie qui est accessible sur Internet et utilisable sous
forme de scénarios type " what if ? ". Ce simulateur a été conçu
et testé pour être utilisé en interactif avec des pêcheurs, approche qui me semble très
pertinente tant en termes dapplication de la recherche quen termes de construction robuste (validation sans complaisance)
du simulateur.
- Jones & Berry proposent dutiliser des aires protégées comme des aires de référence
(permettant dévaluer limpact de la pêche en zone non protégée).
- Trainor présente un monitoring de flottilles par satellite. Cette méthode moderne (et désormais
financièrement accessible), leur a permis de suivre avec précision 800 bateaux.
- Shin a présenté des résultats de simulation multi-agents sur la dynamique multi-spécifique
dun écosystème dans lequel les niveaux trophiques se construisent par émergence. Bien quencore
exploratoire, une direction de recherche écologique intéressante (relation avec la science des systèmes)
sembler exister là.
- Jai, en ce qui me concerne, présenté le poster suivant : Le Fur, J. and P. Bommel. Co-viability
of a resource and its fishery: a coupled individual based model of round sardinella exploitation in Senegal.
- Documentation disponible
- Le livre des résumés (conférences invitées et posters) a été fourni
lors du symposium,
- Un proceeding ICES devrait être édité prochainement contenant le texte des communications
invitées et une sélection sur les posters.
- Le site Internet du symposium est http://www.ices.dk/symposia/ecoeff.htm; une dizaine de posters y sont
présentés.
- Commentaire personnel
- Globalement, le colloque a pu paraître une succession de poncifs sur le thème. Ils méritaient
dêtre explicitement traités. Les rassembler de façon synthétique, structurée
et condensée a été je pense un des grands mérites de cette réunion.
- Le panorama offert en début de colloque sur les différents types décosystème et
de ressource a aussi pu sembler long. Il a cependant permis doffrir un panorama quasi exhaustif du domaine, de
sa diversité et de ses problèmes génériques. On est ainsi ressorti avec une vision
globale dun problème (effets de la pêche sur les écosystèmes) qui a été
très bien traité.
- La séance sur la quantification, bien que peu palpitante (on avait ici un bilan de l'avancement des
connaissances pour la partie académique de la science halieutique, peu dapproches vraiment novatrices étaient
présentées) a été instructive. Des efforts en termes de quantification semblent en
effet nécessaires (Cury, comm. Pers.) et de nombreuses voies de recherche peuvent encore être explorées
dans ce domaine.
- Enfin, en termes de recommandations pour la gestion, il reste beaucoup à faire et certains gestionnaires
(lUE particulièrement qui mest apparue très conservatrice en comparaison avec les autres gestionnaires
présents) nous ont signifié (avec condescendance) quils nous écriront quand nous aurions
des résultats tangibles. il y a donc aussi beaucoup à faire sur la façon dont la gestion est
actuellement appréhendée. La co-gestion, la gouvernance, lapproche participative ou patrimoniale
ont leur avenir devant elles.
Dans le futur, il me semble que si lapproche écosystème est prise en compte dans la gestion,
ce sera moins dans la gestion institutionnelle des pêches, quà travers linfluence ou le pouvoir
grandissant que prendront les lobby écologistes (ONG) et/ou par la pression de lopinion publique qui est
de plus en plus informée (Cf. expo sur la mer de Lisbonne 98). Quel sera le rôle de la recherche dans
ce nouveau contexte ? Sadaptera-t-elle avec vigueur, se transformant en recherche-action au détriment
dune progression des connaissances ? Maintiendra-t-elle son statut avec pour corollaire une vitesse dévolution
qui sera forcément en deçà de celle du changement effectif ?
Laperçu que lon a pu avoir dans ce colloque indique que les deux voies sont empruntées, le transfert
direct a montré quil pouvait conduire à des résultats probants en terme de réduction
du " carnage " (expression de Pauly, 1999). Dautre part, malgré locéan dinconnu
qui reste à explorer, il semble que lon perçoit désormais beaucoup mieux la nature des problèmes
à traiter. Et " identifier le problème, cest trouver la solution ".
Conakry, Avril 99.